Insomies (libre)

4 heures du matin et je tournais en rond dans ma chambre. J’avais la chance d’avoir un logement pour moi, ne devant pas être, à mon âge, avec des petites midinettes comme ma fille. Si la PSI était trop machiste pour me placer au-dessus, malgré mon âge et mon expérience, ils avaient tout de même convenu que j’ai le droit à mon intimité. Puis cela me permettait de rester loin des discussions d’adolescentes qui auraient pu y inclure ma fille de 15 ans. Non, j’étais bien mieux ainsi et même s’il n’y avait pas de grade, l’âge me suffisait pour imposer le respect en ma présence.

Il m’arrivait régulièrement de faire des insomnies. Heureusement pour moi, j’étais quelqu’un de très résistant à la fatigue, et cela ne me dérangeait pas plus que cela d’être durant 48h sans aucun sommeil. Sur mes murs étaient affichés quelques informations que j’avais réussies à glaner à droite et à gauche, cherchant bien évidemment qui, à New York et aux Etats-Unis, pouvait être un sang-mêlé, mais aussi qui était la fille que j’avais abandonnée il y a de ça 24 ans. Très méthodiquement, j’avais classé les actes de naissance avec l’un des deux parents inconnus. Seul souci, il y avait un nombre d’enfants affolant né sans leur père.

J’avais aussi fait la liste des enfants américains mis à l’orphelinat, mais je cherchais une aiguille dans une botte de foin. Il m’arrivait de temps à autre de prendre une de ses fiches, de rechercher l’enfant aujourd’hui et d’aller l’interroger, mais je n’avais rien appris … Bon sang, en cinq ans, je n’avais pas avancé ! Oh si, nous avions une petite armée de personnes prêtes à prendre les armes, nous savions l’identité de quelques demi-dieux … Mais ce n’était pas assez … Surtout pour LA retrouver.

Comprenant que je n’arriverais à rien, je décidais d’aller chercher quelques livres à la bibliothèque du camp. Je pris donc ma voiture, un 4x4 rouge et je fus en quelques minutes sur place. Arpentant tranquillement les couloirs, mes talons claquant sur le sol, j’entrais dans la bibliothèque où la lumière était déjà allumée. Etonnée, je demandais, d’une voix dénuée de toute émotion :

« Il y a quelqu’un ? »

Je refermais la porte et je m’avançais dans les rayons. Je cherchais quelques livres de mythologie qui allaient peut-être déclencher en moi une illumination. Personne n’avait encore répondu …

La PSI recueillait depuis cinq ans maintenant des informations sur les sangs-mêlés. Le tout était maintenant de les utiliser et de faire en sorte qu’elles soient des armes contre ces monstres qui se formaient dans le but d’anéantir le monde. Car oui, à mes yeux, c’était pour cela qu’ils étaient regroupés et qu’ils s’entrainaient à utiliser des armes, qui, entre nous, étaient quelque peu … has been, comme disent les jeunes. Vous l’aurez donc compris, je n’ai aucune confiance en ces enfants de dieux, et encore moins en leurs parents vieux de plusieurs millénaires, en haut de leur mont Olympe, à copuler à droite et à gauche.

Je cherchais jour et nuit comment en débusquer le maximum … Pour les faire parler, pour leur tirer les vers du nez et pour leur faire comprendre qu’ils n’étaient pas les maitres du monde. Je n’étais pas forcément une adepte de la torture, mais je dois avouer que l’on se laisse parfois emporter lorsqu’on a ce pouvoir. J’avais assisté quelques fois à des interrogatoires et la plupart du temps, ils étaient assez musclés. J’étais plutôt, de mon côté, du style à attirer les sangs-mêlés chez nous, à tenter de leur retourner le cerveau et les monter contre ce parent qui les avait laissés.

Pour les trouver, je faisais confiance à notre bibliothèque qui regorgeait de documentation sur la mythologie grecque et romaine. C’est pour cela que je m’y étais rendue, pensant être seule. Les lumières allumées m’avaient indiqué la présence d’un opposant, sauf si quelqu’un était parti sans les éteindre. J’aurais dû me douter qu’il s’agissait de Mina. Je connaissais la passion de la jolie blonde pour les livres. J’étais un peu comme elle. Nombre de fois où je me retrouvais seule, chez moi ou dans la nature, avec un bouquin sentant le vieux …

Lorsqu’elle s’adressa à moi, je forçais un sourire. J’avais beaucoup de mal mais bon, ayant fait pas mal de politique, j’y parvenais plutôt bien. Cela me faisait toujours bizarre que des petits jeunes me tutoient mais vu qu’ici, j’étais au même niveau qu’eux, je ne pouvais pas m’attendre à un vouvoiement en bonne et due forme. La sang-mêlé me demanda alors si elle pouvait m’aider. C’était vraiment sympathique de sa part, elle était de nature généreuse et amicale, et j’aimais beaucoup sa douceur. Pourtant, au fond, j’étais certaine qu’une combattante se cachait. C’était d’ailleurs pour cela que je l’avais prise sous mon aile, me permettant parfois de la réveiller à pas d’heure pour s’entrainer. Mais c’était ma façon de montrer mon attachement.

« Bonsoir Mina … Je pensais que vos lits étaient confortables. A vrai dire, je ne sais pas ce que je cherche réellement. Je suis un peu bloquée sur la recherche des sangs-mêlés … Vois-tu, j’ai des extraits de naissance d’enfants né de père inconnu, mais je ne sais pas avec quoi je pourrais coupler cela … Il me semblait avoir lu un truc … Sur une spécificité de leur vie humaine … »