release the beast ∴

Dans une ultime tentative, ses membres se raidissent, voulant échapper aux fantômes du passé. Son corps tente de lui éviter la torture mentale que sont ses cauchemars incessants. Ses poings se serrent et sa poitrine se soulève à un rythme effréné. Enfin, ses yeux sombres s’ouvrent dans l’obscurité. Tous les membres de son corps tremblent et il ne peut malheureusement rien y faire. Il envoie balader les draps sur lesquels sa peau moite de sueur s’est collée. Son regard vide scrute l’obscurité un moment, alors que sa respiration semble vouloir se stabiliser. Il déglutit et s’assoit lentement sur le bord de son lit. Seuls les rayons de la lune s’immiscent dans l’obscurité. Il inspire par le nez et expire par la bouche à quelques reprises, voulant apaiser la tempête qui fait rage. Il serre la mâchoire et se lève. Le parquet est frais sous ses pieds alors qu’il rejoint en quelques pas la distance le séparant de ses vêtements. Il enfile rapidement un t-shirt noir et un jean avant d’empoigner sa veste de cuir et de mettre ses chaussures. Dans les couloirs sombres de l’Agence règne le silence.

La fumée s’échappe de ses lèvres meurtries et se dispersent dans la nuit. Sur le toit de l’Agence, James laisse ses jambes dans le vide, assis sur le béton frais du bâtiment. Une cigarette pend à ses lèvres, alors qu’il regarde la teinte rosée de l’aube se dessiner à l’horizon. Ce spectacle lui importe peu, malheureusement. Même l’harmonie qui règne dans la ville ne réussit pas à diminuer ni le tremblement de ses mains, ni cette envie de se déchirer les poumons en hurlant la colère qui l’habite. Il tire une seconde, une troisième et puis une énième bouffée de sa cigarette jusqu’à ce qu’il n’en reste rien. Il songe à s’en rallumer une autre alors qu’il entend des pas se rapprocher. Il plaint cette personne avant même de connaître son identité. Ses envies de meurtres le rendent encore moins cordial qu’il ne l’est d’habitude.

Je me réveille un peu sonnée dans la bibliothèque de l'agence. J'étais encore tombée endormie le nez dans mes livres... Il faut dire que la mythologie grecque n'est pas le sujet qui me passionne le plus, mais c'est la méthode de prédilection pour en apprendre plus sur nos ennemis. Bien sûr, les rapports de la PSI avaient eux aussi leur lot de choses importantes à apporter, mais la plupart des rapports d'importance étaient gardés top secrets... Jamais je ne remettrai mon dévouement envers les opposants en question, mais je dois avouer que certains de leurs travaux piquent ma curiosité. Je lève la tête de sur la table et je sors mon poudrier de mon sac a main. Je me regarde dans le miroir de ce dernier... Ce n'est pas si pire! Mon maquillage n'est pas trop amoché, je peux sortir sans avoir peur qu'on me prenne pour la renaissance du démon!

Je me dirige vers le toit du bâtiment, l'un des seuls endroits peu fréquentés de la PSI. Il faut dire qu'il n'y avait pas grand chose d'intéressant si ce n'est que la vue. Je tape du pied dans l’ascenseur... Avec tout nos machins technologiques, on a pas encore inventé un téléporteur? Bon sens que ça nous ferait économiser du temps! Je regarde les chiffres s'allumés au-dessus de la porte jusqu'à ce que le dernier soit illuminé. Les portes s'ouvrent et je prends les escaliers du dernier étage qui donnent sur le toi. En ouvrant la porte je remarque tout de suite une tête familière au loin. Apparemment je ne suis pas la seule assez folle pour traîner sur le toit d'un building à 3h46 du matin juste parce que j'en ai envie!

Le pauvre James jette sa cigarette avant d'en rallumer une autre aussitôt. Il ne semble pas être très zen... Je m'approche de lui tout en gardant une distance avec le rebord du toit... J'aime bien la vue d'ici mais je ne veux surtout pas voir la hauteur à laquelle je me trouves! J'adresses un sourire au jeune demi-dieu en guise de salutation. Je ne crois pas qu'il soit nécessaire de passer par le protocole du ''salut ça va oui moi aussi'' à cette heure et à cet endroit. De toute façon, s'il est ici c'est probablement pour éviter ce genre de banalité du quotidien qui ne font que nous faire chier quand on a pas envie de jouer les gentils.  Je plonge à nouveau la main dans mon sac pour y sortir ma vapoteuse rose bonbon. Je me tire une longue bouffée avant de m'adresser au jeune homme.

- Dur réveil pour toi aussi mon loup?

L’intrus s’approche d’un James dont les muscles sont tendus d’un pas décidé, ne sachant pas qu’il devrait plutôt fuir à grand pas, s’il ne veut pas que l’Opposant explose. Puis, les pas cessent et, à contre cœur, Jay tente un coup d’œil. La mâchoire serrée, il ne renvoie pas son sourire à la jolie Métis. Victoria est l’un des membres de la PSI qu’il respecte le plus, mais sa visite ne lui plaît pas du tout, ce matin. Il n’est pas d’humeur à supporter son insupportable bonne humeur et ses mots doux. Cette femme est courageuse et forte, mais elle lui rappelle beaucoup trop sa propre mère. L’Opposante cherche dans son sac à main et en sort une vapoteuse dont la couleur pourrait brûler la rétine de n’importe quel être n’étant pas aveugle. Zombie grince des dents car il en comprend qu’elle n’a pas l’intention de partie – chose qu’il apprécierait grandement. Dur réveil pour toi aussi mon loup?

James repose son regard sur l’horizon, les poings serrés. Il détruit sans le vouloir la cigarette qu’il tenait à la main et cela ne fait que l’agacer d’autant plus. Ce surnom lui donne envie de gerber et de pleurer à la fois, mais sa colère l’empêche de ressentir ne serait-ce que l’ombre d’un signe d’humanité. Ne m’appelle pas comme ça, Victoria. Son ton est dur et ses yeux lancent des éclairs au bâtiment sur lequel ses yeux sont posés. Les mains toujours tremblantes, cherche une cigarette dans la poche de sa veste de cuir, en vain. Plus frustré que jamais, il lance ce qu’il reste de la cigarette en bouillie d’un geste brusque en lâchant un grognement bestial. La fureur qui le ronge menace de prendre le dessus et cette foutue cigarette n’arrange rien à la situation. Il se lève brusquement. Alors qu’il devrait avoir peur de tomber, il joue plutôt avec le feu. Ses jambes tremblantes menacent de flancher, alors il se rassoit. Puis, il cache son visage de ses doigts fins tatoués se balançant de l’avant vers l’arrière comme un enfant perdu. Puisqu’il n’a pas la force de partir, il ne peut que demander à Victoria de le faire à sa place. Dégage.

Comme tu veux James! C’est ça, pense-t-il, sarcastique. Si c’était comme il voulait, Victoria aurait déjà rebroussé chemin pour s’engouffrer dans les entrailles de l’Agence en le laissant passer ses nerfs tout seul sur le toit. Il semblerait qu’elle ne comprenne cependant pas le message. Zombie tente en vain de se lever pour échapper à tout contact humain. Or, ses membres ne répondent plus à sa volonté, tremblant de rage. Il dit avoir d’un ton sans appel à l’Opposante de dégager vite fait. Il n’y va pas en douceur, car il considère que la seule façon de lui faire comprendre qu’elle devrait partir est d’y aller d’une façon très directe, voire même déplaisante. Dans l’état où il est présentement, il pourrait tuer quelqu’un de sang-froid. Après tout, ne l’avait-il pas fait auparavant? Si. Il l’avait fait. C’est d’ailleurs, en partie, la raison de sa rage. Il est en colère contre lui-même. Il à la rage en pensant à cette fureur qui dort en lui. Cette même lueur de psychopathe qui illuminait le visage de son père il y a de cela déjà des années. Néanmoins, ce regard ne quittera jamais ses cauchemars. Victoria s’approche du jeune homme instable et s’assoit à ses côtés sans s’assoir sur le bord de l’immeuble. Il hoche négativement la tête et serre la mâchoire. Cette femme ne comprendra donc jamais? Avec tout le respect qu’il lui doit, James ne voudrait surtout pas passer sa rage sur elle. C’est pourquoi il est primordial qu’elle déguerpisse au plus vite.

Écoute James, je prétends pas être psychologue ou un truc du genre et je suis pas ici pour te faire dire quoi que ce soit que tu ne veux pas dire, mais je ne ferai pas partie de ceux qui regardent quelqu’un s’écrouler à l’intérieur sans essayer quoi que ce soit… James est plutôt soulagé en entendant ses paroles. Le pire qu’elle aurait pu faire aurait été de l’obliger à parler. Or, elle a eu le respect de ne pas insister. Cela est une très bonne chose, mais malheureusement pas suffisante pour calmer la tempête qui fait rage à l’intérieur du légionnaire. Il ne pipe mot, toujours recroquevillé sur le béton en position quasi fœtale. On a tous nos côtés sombres et c’est à nous de décider si on veut les garder pour nous ou les partager. Je ne veux pas te faire parler sur quoi que ce soit mais ce que j’essaie de te dire c’est que si tu ne te sens pas bien tu peux m’en faire part. Un rire cynique sort de sa gorge. Il ne souhaite pas en parler non. À quoi bon? Qu’est-ce que tu veux savoir Victoria? Te raconter mes problèmes ne les effaceront pas! Il ne suffit pas d’évoquer mes démons pour qu’ils me laissent tranquille. James pousse un soupir avant de la regarder. Tu crois que j’ai cette apparence-là pourquoi, mh? Je suis un monstre. SOIT, tu devrais te méfier et filer vite fait.