Un lever de soleil sur les falaises (Colress)

J’aime me balader dans New-York. J’ai une petite maison en banlieue, un peu en retrait de la grande pomme. Je n’aime pas le monde, ni le bruit, alors j’ai pris une maison en bord de plage. Je suis une adepte de cet endroit. L’eau, le bruit des vagues s’écrasant contre les falaises, tout cela provoque en moi une sérénité profonde. Surtout que je vis seule ici, puisque ma seconde fille est à la PSI, ayant voulu vivre avec des jeunes de son âge. Je ne lui en ai pas voulu, il faut dire que vivre seule avec sa mère depuis toujours n’est pas des plus amusants.

Comme tous les matins, je me trouvais sur une des falaises. Je n’avais pas du tout le vertige, et j’appréciais le fait de me trouver les pieds dans le vide, à des dizaines de mètres au-dessus de la mer. De là où je me trouvais, je pouvais voir le soleil se lever. Pourtant, je ne suis pas une grande romantique, loin de là, mais j’aime la nature … Si je n’étais pas aussi obnubilée par la stratégie, j’aurais sans doute été tenté par une carrière d’herboriste … Et si j’avais eu des pouvoirs, j’aurais aimé que ce soit en rapport avec l’eau.

Le regard perdu à l’horizon, je profitais, en ce jour de printemps, du vent caressant ma peau. Il était sept heures du matin mais la température était correcte. Une simple veste en jean sur le dos permettait de supporter la fraicheur du matin. Aujourd’hui, la journée allait être assez calme … J’avais passé une bonne partie de la nuit à recouper pas mal d’informations données par Mina et j’avais trouvé le nom de plusieurs jeunes nés de père ou de mère inconnu, et victime de troubles dyslexiques et d’hyperactivité. Je n’avais plus qu’à les trouver, ce qui était plus compliqué puisque la plupart était dans une école que les parents disaient « spéciale ». Je savais bien sûr qu’il s’agissait de ce fameux camp de sangs-mêlés … J’espérais que les parents donneraient mon nom à ces jeunes. Avec un peu de chance, j’étais sur une bonne piste.

La tranquillité ne dure jamais bien longtemps. Au bout de toutes ces années, j’avais fini par le comprendre. C’était bien pour cela que j’avais du me faire à l’idée que je ne pouvais pas rester en marge de la société, à ne côtoyer personne et surtout, à ne rencontre ni croire un être humain. Mais mon expérience m’avait aussi appris que je ne devais surtout pas m’attacher à qui que ce soit. Cela était bien plus facile à dire qu’à faire, mais pour l’instant, j’y parvenais. Oh, bien sûr, j’appréciais la plupart des jeunes de la PSI, mais rares étaient ceux avec qui je me permettais d’être moi-même.

Il faut dire que m’attacher à quelqu’un ne m’avait jamais rien apporté … Je ne parlais pas de ma fille, car on ne peut aller contre cela. L’amour maternel est quelque chose d’indéniable, de naturel et qu’on ne peut contrôler. Mais en dehors de cela, la dernière personne que j’avais aimée m’avait trahie, se détournant de moi au moment où je me déclarai réellement à elle. Autant vous dire que cela m’avait totalement vacciné, vous vous en doutez bien. Je ne me croyais pas prête à aimer de nouveau, car le souvenir de cette femme était encore intact.

Une voix me sortit de mes pensées. Face au soleil levant, je mis quelques secondes avant de me retourner pour voir qui s’adressait à moi ainsi, et quelle ne fut pas ma surprise de voir Colress, le fils de celle à qui je pensais juste avant. La vie vous fait parfois de drôles de farces. Il n’avait jamais su pour la relation entre sa mère et moi, pour la simple et bonne raison qu’elle m’avait simplement présenté comme une simple amie. Je l’avais accepté à l’époque mais lorsque j’avais voulu tout officialisé, je l’avais perdu.

Son fils lui ressemblait beaucoup. Je me perdus quelques minutes dans son regard, repensant à la jeune femme. Colress m’expliqua qu’il était de retour sur New-York, et, immédiatement, je me demandais si sa mère aussi :

« Bonjour Colress … Je vais bien, merci, et toi ? Ta mère est aussi de retour à New-York ? C’est fou ce que tu lui ressembles … »

J’étais quelque peu perturbée. Le revoir ravivait une douleur profonde … Je ne savais pas comment réagir et j’avais envie de savoir ce qu’elle devenait …